EN QUETE DE SOI - Episode #13
Chanter pour exister
Depuis quelque temps, je travaille à Paris dans la promotion culturelle. En parallèle, le soir et les week-ends, je m’autorise enfin à vivre une de mes passions : chanter. J’intègre Tarace Boulba, un collectif fondé par deux ex Négresses Vertes dans lequel je deviens choriste. Je pose ma voix sur des rythmes funk et groove pendant plus de dix ans en France et à l’étranger.
Vivre la création dans un groupe de cinquante personnes environ, c’est autant d’ego à gérer, une véritable école de l’acceptation de l’autre dans sa différence.
Il faut dire que le groupe est un exemple de coopération entre les classes sociales, couleurs de peau et croyances.
Sur scène, je guéris une partie de mon être, j’oublie mon quotidien, je me sens comme chez moi, même si le manque de confiance se manifeste là encore : je reste choriste. Je peux m’exprimer sans crainte d’être critiquée. Mais par ce choix inconscient d’un tel groupe, je me fonds au milieu de nombreuses personnes sur scène, histoire de ne pas prendre trop de place. On y revient.
Pourquoi je ne devrais pas prendre de place tout simplement ? Le jumeau jamais né ? Le choix inconscient de ne pas exister comme lui? De ne pas me réaliser par culpabilité? Et si c’était vrai, cette histoire de jumeau ?
L’amour du public toujours généreux et enthousiaste et la passion du groove deviennent des moteurs pour supporter les ego des autres. Pendant dix ans, je fais des tournées et concerts que ce soit dans la rue au contact direct du public ou sur des grandes scènes jusqu’à des festivals où des milliers de personnes assistent à nos concerts.
Je découvre la transe de la scène. Une émancipation pour la femme qui n’osait pas.
Je vis également une histoire d’amour avec un des musiciens pendant un an. Nous partons en tournée ensemble. Il y a ce côté rock’n’roll qui me plaît bien. Jusqu’à présent, j’étais très attirée par le type brun ténébreux, latin ou méridional. Mais mon regard semble avoir changé. Cet homme, que je n’aurais jamais regardé avant, m’attire par sa sensibilité et sa persévérance à vouloir me conquérir. Je ne suis pas convaincue, mais j’ai tellement besoin d’être cajolée et de partager que je cède à ses avances, tout en continuant à recevoir des mails de Mike. Mon esprit n’est pas entièrement disponible pour cette relation. J’aimerais construire ma vie avec quelqu’un. Mais tant que la situation reste floue, ma vie l’est aussi. Même si ce musicien me présente ses parents, ses amis, nous ne passons pas le cap de l’année 1.
Je dois donc tenter de clarifier une bonne fois pour toutes ma situation amoureuse avec mon Américain.
Neuf ans que cela dure ! Il est temps pour moi de passer défini- tivement à autre chose.
L’occasion se présente avec une tournée musicale programmée aux États-Unis, où je propose à Mike de nous retrouver. La Nouvelle-Orléans et le Festival international de Lafayette seront nos lieux de retrouvailles. Mais la veille du départ, excitée à l’idée de cette tournée et de le retrouver, je reçois un mail de lui : il vient de rencontrer une femme. Il a besoin d’une vie rangée, il a envie de se poser, de fonder une famille avec une personne proche géographiquement. Que notre histoire est trop compliquée. La distance nous a trop éloignés malgré l’amour…
Submergée par la tristesse, je me mets en colère pour mieux la masquer, l’étouffer et me permettre de clôturer cette histoire définitivement.
La colère passée, je réussis à lui envoyer un dernier mail lui souhaitant d’être heureux. Nous nous disons adieu. Non sans peine. Mais sincèrement. À cet instant, sans le savoir, il me libère. Je ne sais pas encore qu’il est mon âme sœur…
À mon retour de Chicago, malgré toute la joie de partager la musique avec un groupe, je ne me sens plus en phase avec les textes et ces histoires d’ego, après toutes ces déambulations scéniques. Je cherche à toucher du doigt quelque chose de plus absolu que je n’ai pas encore trouvé. J’ai beaucoup appris avec ce collectif musical.
D’autres groupes suivront, très différents. Et, chaque fois, il sera question de prendre ma place. Le complexe de gémellité continue de sévir bien malgré moi…
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