Emmanuel m’offre un jour une « lecture d’âme » et me raconte sa propre expérience, qui lui a montré certains aspects de sa vie, lui permettant de mieux comprendre son chemin, et donc de l’apaiser.

Nous cherchons tous à nous apaiser. De nos peurs, de nos anxiétés, de nos doutes. Tout ce travail intérieur représente un chemin vers la paix et une raison de trouver un peu de sens à ce chaos.

Et puis l’aventure que cela implique. L’inconnu, qui demeure la plus grande aventure d’une vie. La plus grande peur aussi.

L’originalité du cadeau se mêle à l’excitation de l’inconnu. Je vais rencontrer des personnes capables d’entrer dans les mémoires akashiques, ces sortes de mémoires cosmiques qui enregistreraient les événements du monde, tout comme mes vies antérieures. Et si ce n’était que l’inconscient collectif de Jung? Qu’importe. Cela m’amuse.

Je ne dirai rien. Je n’ai pas de trace de ma vie sur Internet, à cette époque. Facebook et compagnie n’ont pas encore envahi notre quotidien. Donc cette personne n’aura rien à se mettre sous la dent pour en savoir plus sur moi. Si ce n’est ces fameuses mémoires akashiques. Chaque histoire contient une pépite, j’en suis convaincue.

Cette lecture d’âme me donne la sensation de vivre quelque chose hors du commun. Qui aurait pu croire il y a dix ans que je donnerais une quelconque attention à une personne cherchant à lire ma destinée dans un monde invisible? J’aurais sans doute méprisé cette « illuminée » et ses affabulations.

À peine suis-je arrivée que Françoise et Jean-Claude m’expliquent comment se déroule la séance. Jean-Claude pose les questions et guide Françoise dans le couloir temporel et énergétique. Puis Françoise reçoit les informations sous forme de visions, qu’elle nous transmet oralement. Des images défilent devant elle, comme au cinéma. Cela lui demande une énergie soutenue. Ensemble, ils ont la faculté de se projeter dans la mémoire du temps. Entre excitation et crainte, je me sens prête à la laisser explorer le grand livre de mes vies antérieures. Je leur donne juste ma date de naissance et mon nom. Rien de plus.

Françoise ferme les yeux, Jean-Claude commence à parler à des entités invisibles. J’aurais pu rire à une époque, mais je sens que cela existe, sans pouvoir mettre de mots dessus. Jean-Claude remercie les entités pour ouvrir le chemin jusqu’aux mémoires akashiques. Il demande à Françoise si elle est arrivée. Une grande respiration. Une agitation sur son visage. Elle semble en transe. Mais sereine. Puis sa voix se modifie légèrement. Comme si elle recevait une information de l’au-delà. Ou qu’un esprit parlait à travers elle. Mieux que dans un film. Jean-Claude lui demande de se connecter. Françoise, avec un grand sourire, confirme que c’est chose faite. Et alors, je l’entends.

« EstElle vient de si loin. Elle a eu des milliers de vies. Une vieille âme. Tout d’abord, une poussière d’étoiles qui chantait avec une voix si cristalline. Magnifique. Tu es arrivée sur Terre avec une voix phénoménale car tu avais beaucoup chanté dans les étoiles. Je vois ta première incarnation avec cette voix en Atlantide. Tu te servais d’elle pour harmoniser à l’aide des cristaux. Je te vois face aux cristaux, tu reçois un son venant d’eux, tu le perçois dans ta tête et ils t’apprennent à perfectionner ta voix jusqu’à en arriver presque à l’harmonique du cristal. Tu chantes des notes pures. Tu reçois des patients et, avec l’aide des cristaux, tu harmonises les gens sur les plans les plus subtils. Mais surtout sur l’émotionnel; par le chant, tu arrives à calmer les angoisses et cela harmonise le tout. Sans apposition des mains, le cristal relaie. C’est phénoménal, en quelques secondes, cela marche… Mais EstElle, tu as tellement de vies qu’il va falloir savoir exactement ce que tu cherches. Nous devons faire un choix, il y a trop d’informations à traiter. Je vois beaucoup de choses dans la créativité et la médecine. Veux-tu en savoir plus ? » Évidemment, j’accepte.

Françoise m’apprend alors que ma créativité s’est manifestée principalement dans le théâtre et la musique, en chantant et jouant. Elle me voit sur le parvis d’une église au Moyen Âge jouer des scènes de la vie du Christ. Après un silence, elle dit me voir ensuite troubadour au XIIIe siècle. J’écris et observe la vie, composant et interprétant mes chansons à la mandoline. Je suis un homme reçu devant des banquets seigneuriaux. Ma voix porte, mes textes sont inspirés de la vie dans les châteaux. Après une vie de débauche, je meurs à trente ans. Françoise me dit que mon âme a demandé à revenir dans une nouvelle incarnation au XVIe siècle dans une troupe itinérante de la commedia dell’arte, en Italie.

On me dit que l’on ne maîtrise pas un art en une seule incarnation, qu’il y a une progression d’incarnation en incarnation.

Puis j’apprends qu’au XVIIe siècle, je travaille dans une troupe et que j’y croise Molière. Le théâtre est ma vie.

Jean-Claude essuie le visage transpirant de Françoise. Elle a l’air de souffrir.

– Vois-tu autre chose Françoise pour la musique? demande Jean-Claude.
– La musique est surtout pratiquée comme médecine. Je vois plein de situations où EstElle utilise sa voix comme un médicament, en Inde. EstElle, à cette époque, tu es un homme très réputé pour harmoniser les gens avec ta voix. Et maintenant tu fais partie de la communauté des Esséniens à l’époque du Christ. Tu aides les thérapeutes en chantant les voyelles. La puissance de ta voix guérit. Tu en as soigné, des gens, pendant cette incarnation… Après plusieurs vies à utiliser le chant comme voie de guérison, tu demandes à te réincarner comme musicien… Ce que tu seras au XIXe siècle, musicien dans un orchestre de chambre sous Louis Philippe. Et au début du XXe siècle, tu pratiques l’accordéon en Pologne. »

J’ai l’impression de vivre un scénario bizarre, écrit pour me donner quelques sensations. Pourtant la réalité me saute aux yeux. Cette femme ne me connaît pas. Pourquoi capte-t-elle ces images ? J’ai la sensation qu’il y a du vrai dans tout cela. Je comptais sur cette lecture d’âme pour m’aider à trouver le sens de ma vie, mais la probabilité que Françoise tombe exactement sur ce qui interroge ma vie actuelle me laisse perplexe. Alors je me lance :

– Est-ce qu’une vie antérieure peut me permettre d’y voir plus clair pour ma vie actuelle ?
– Oui. Je peux entendre ce que ton âme a demandé dans ton incar- nation actuelle : de vivre la liberté. Le maximum de liberté. Tu ne supportes aucune attache, tu veux te sentir libre parce que tu as été prisonnière dans la vie précédente. Tu es revenue dans ta vie actuelle pour apprendre le pardon. Pardonner à ceux et celles qui t’ont fait souffrir dans cette vie précédente. 

J’avale ma salive. Ce qu’elle dit est vrai : je ne jure que par la sensation de liberté. Et si je ne me sens pas libre, j’étouffe. Litté- ralement. Je dois m’enfuir ou me protéger.

Viennent ensuite les images difficiles, Françoise respire fort. Comme en transe légère. Suis-je prête à l’entendre? Je n’ai pas envie. 

Je lui demande s’il y a un message qu’elle perçoit qui pourrait me guider dans ma vie actuelle. Comme ma difficulté à couper les ponts avec cet Américain que je pressens être mon âme sœur. Françoise me confirme ce lien spécial des âmes qui se connaissent depuis le commencement… Mon ressenti de connaître Mike dès nos premiers échanges était donc réel…

Elle reprend son souffle et raconte encore d’autres épisodes de vies de femme avec des accouchements, des morts et des difficultés à enfanter. Je reste stupéfaite. Ce qui me trouble, c’est cette impression de normalité alors qu’il n’y a rien de normal dans cette expérience. Mon esprit cartésien et pragmatique devrait bondir, rugir. Eh bien non, je suis apaisée, calme, comme si j’étais à la bonne place. Une place que je connais inconsciemment. Et si l’inconscient se nichait dans ces mémoires akashiques ?

Elle termine la séance sur des mots apaisants à mon égard : « J’ai beaucoup aimé votre route EstElle. Vous êtes une belle âme. Certes, vous avez aussi vécu des situations terribles. Nous n’avons pas le temps de tout regarder en une fois. Mais ce qui se présente aujourd’hui, a son utilité dans cette vie. Ce qui vient, est ce qui convient à votre situation. »

Jean-Claude m’apprend aussi que les visions de Françoise sont toujours en lien avec la vie actuelle du demandeur, pour servir à mieux comprendre le présent. Puis nous échangeons sur ma capacité à recevoir des informations en direct par le biais de mes intuitions ou mes rêves.

« Comme beaucoup de femmes de notre époque, tu vas apprendre à guérir ces parties de toi blessées : le féminin et le masculin souillés par trop de violence et de négativité. »

Les derniers mots de Françoise restent gravés dans ma mémoire :

« Mon dernier conseil. Ta pensée doit être claire. Pensée claire égale vie claire. Tes peurs freinent le tout. Avec ton bagage spirituel acquis des anciennes vies, sache que tu as toutes les réponses en toi. Et puis, apprends à t’aimer davantage. Et n’attends rien des autres. Donne sans attendre de retour. Cela fait partie de ton chemin… Ton guide m’a dit que plus tu seras dans le lâcher-prise et la confiance, plus les choses arriveront naturellement sans avoir à forcer le destin.

La création met du temps à s’incarner dans la matière. L’accélérateur est l’amour. En aimant tout ce que tu fais et dis, tu auras les cadeaux que tu désires. Mais tu dois savoir ce que tu veux. 

Je ne sais plus si je dois remercier Emmanuel ou lui en vouloir d’avoir ouvert la boîte de Pandore. Depuis cette lecture d’âme, je ne cesse de lire sur les vies antérieures et les mémoires akashiques. J’en ai le tournis. Toute cette encyclopédie de mots, de visions, de coutumes, de croyances, d’expériences, de suppositions, d’in- tuitions, de rêves, de religions… Où est la réalité? Y a-t-il une seule réalité ? Impossible.